Noël approche à grand pas, et nombreux sont les jouets qui vont se retrouver au pied du sapin. A l’occasion des fêtes de fin d’année, notre équipe est partie à la rencontre de Céline Lefèvre chargée de l’administration de l’association Rejoué. Objectif : réemployer et recycler tous les jouets.
Bonjour Céline, pouvez-vous nous en dire un peu plus à votre sujet ?
Je suis Céline Lefèvre, responsable administrative et financière à Rejoué. J’ai toujours travaillé dans l’Économie Sociale et Solidaire notamment à France Active puis au sein du Réseau Envie en tant que directrice adjointe puis directrice par intérim. Je travaille depuis un an chez Rejoué.
Pouvez-vous nous dire quelques mots sur Rejoué ?
Créée en 2010, l’association Rejoué est un chantier d’insertion qui vise à réemployer et recycler les jouets. Nous sommes actuellement 22 personnes dont 8 permanents et 14 en insertion. Notre modèle social s’adresse principalement aux femmes car les chantiers d’Insertion leur sont moins ouverts ; on y trouve majoritairement des hommes car il y a souvent besoin de manutention dans les activités relevant de l’Insertion. Chez nous, les femmes ont entre 18 et 58 ans. En terme de « clients », nous nous adressons aussi bien à des particuliers, notamment une clientèle de quartier, qu’à des professionnels, ceux qui travaillent avant tout dans le milieu de la petite enfance (crèches, écoles). En ce moment, nous préparons notre grande opération annuelle, le Noël de Rejoué. A cette occasion, plusieurs fondations (Oxybul, Axa Atout Coeur, Bristol Myers Squibb) achètent près de 4500 jouets pour les redistribuer à des associations caritatives (Restos du Cœur, Secours Catholique, Rire d’Enfants…).
Pourquoi avez-vous choisi de fonder votre entreprise sur le modèle de l’Economie Sociale et Solidaire ?
Le jouet est une activité innovante qui se prête parfaitement à ce modèle. C’est un objet fédérateur qui rallie toutes les catégories sociales. D’autant plus que nous sommes sur le volet social, et sur le volet écologique ; nous sommes à la fois solidaires avec nos salariés et solidaires avec l’environnement. Le réemploi du jouet est un marché en création sur lequel il y a beaucoup à faire. Nous agissons particulièrement dans une démarche de sensibilisation, notamment auprès des écoles et des salariés d’entreprises sous forme de team building ; certains d’entre eux viennent nous aider à trier et à valoriser le jouet. Ainsi, ils constatent l’importance du réemploi et du recyclage.
Pourquoi avez-vous choisi d’évoluer sur le secteur du recyclage ?
Car le recyclage est une urgence, et le jouet est une catastrophe écologique. Parfois, nous avons des jouets neufs qui n’ont jamais servi ou très peu. En terme de réduction de la consommation de ce produit, il faut arrêter d’en acheter en masse, quand on pense qu’un enfant peut très bien s’amuser avec un bout de fil (rires). L’économie circulaire est une vraie opportunité dans laquelle il y a beaucoup de choses à réaliser pour faire prendre conscience et sensibiliser le public à une démarche plus soucieuse de l’environnement.
Comment s’organise le recyclage chez Rejoué ?
Dans un premier temps, nous collectons (environ 25 collectes/an, soit 8 tonnes de jouets recyclés en 2013) chez les professionnels ou particuliers. Parfois, on nous livre. Ensuite, les jouets sont triés (50% ne sont pas gardés car ils sont en mauvais état ou ne sont pas labellisés Communauté Européenne) ; ces jouets partent alors dans les filières de recyclage (poubelles jaunes, recyclage des Déchets des Equipements Electriques et Electroniques ainsi que des piles). Nous nous associons également à des collectifs d’artistes pour qu’ils réemploient ou recyclent les jouets et les matières. La valorisation arrive après le tri. C’est la phase de nettoyage du jouet (nous avons des machines à laver et un lave-vaisselle, et nous utilisons des produits écologiques respectueux de l’environnement pour les nettoyer). S’ensuit l’indication des prix via un logiciel de gestion qui référence les jouets par lots (bouquins, jeux de sociétés…). Le prix est alors fixé (environ 50% de rabais sur le prix d’achat). La vente des jouets dans notre boutique constitue la dernière et ultime étape.
Aujourd’hui, on parle beaucoup d’Internet, de Réseaux Sociaux; nous sommes très connectés. Pensez-vous que le web est compatible avec le recyclage ?
Effectivement, je pense que c’est une réelle opportunité, mais nous n’utilisons pas assez nos outils par manque de temps. Nous avions d’ailleurs créé un poste de Community Manager en emploi d’avenir qui n’a malheureusement pas fonctionné. C’est une réelle volonté de s’améliorer sur ce point. De plus, l’originalité de notre projet séduit et nous pourrions accroître notre notoriété sur Internet je n’en doute pas. Il faudrait mutualiser un poste de Community Manager avec une autre structure.
Comment voyez-vous l’avenir du recyclage ?
Je pense qu’il a beaucoup d’avenir car l’économie circulaire prend de l’importance. Avant tout, je me dis que l’Economie Sociale et Solidaire permet de « défricher le terrain ». Certains grands groupes industriels prendront sans doute la main sur le réemploi et le recyclage. Si je prends l’exemple du jouet, on peut très bien imaginer qu’un grand distributeur de jouets arrive sur la même idée que Rejoué ; dans ce cas-là, selon moi, les clients iront chez eux par la facilité, la proximité et leur notoriété. Mais, si au moins, l’ESS aura permis de tracer le chemin d’une démarche sociale et l’environnementale, c’est déjà très positif !
Que vous manque-t-il pour aller plus loin ?
Le prochain défi à relever va être de stabiliser notre modèle. Nos subventions ne seront pas versées à vie, et si nous voulons accroître encore notre chiffre d’affaires, nous devons travailler notre modèle. Nous pourrions nous rapprocher d’un groupe afin de mutualiser certains postes de charges en vue d’équilibrer notre modèle. Nous devons en fixer les objectifs précis. Que veut-on exactement ? Partons-nous sur une Entreprise d’Insertion ? Toutes ces questions méritent d’être posées, et vont constituer un enjeu important pour l’an prochain. En terme de ressources humaines, je pense à un profil commercial pour pouvoir développer nos partenariats et proposer notre projet à diverses entreprises. Enfin, pour les locaux, un plateau unique serait l’idéal pour rassembler toutes nos activités (stockage, vente…) et minimiser les manutentions.
Merci beaucoup pour cette rencontre très enrichissante.
Rejoué,
14, Rue du Général Humbert
75014 Paris
Tel : 01 40 52 54 15
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